Comme chaque matin, vous êtes arrivé-e hyper motivé-e, prêt-e à avancer sur l’ensemble de vos activités. Mais une demande « urgente » est arrivée, vos collègues vous ont interrompu, vous vous êtes perdu dans les détails d’un dossier, vous avez participé à une réunion de 2 heures où vous avez dit 2 mots, …
Et comme chaque jour, à la fin de la journée, vous ressentez la frustration de n’avoir rien fait ! En tout cas pas en lien direct avec votre job.
« Le temps c’est la vie. Aujourd’hui, la plupart d’entre nous ont mal à leur temps et ne savent pas que ça se soigne » Jean-Louis Servan-Schreiber, L’Art du temps
Vous avez l’impression que vous n’allez pas vous en sortir. Vous ne savez plus où donner de la tête.
Là, il y a urgence à se prendre en main, et vous envisagez une formation à la gestion du temps.
Excellente idée !
Vous y apprendrez probablement à identifier vos « voleurs de temps », c’est-à-dire les causes de votre temps perdu ou de votre temps utilisé sans efficacité au regard de vos objectifs.
Parmi les voleurs de temps, certains sont externes, comme les interruptions des collaborateurs ou collègues, les appels téléphoniques imprévus, le visiteur à l’improviste, les réunions trop longues …
et d’autres sont internes, comme le manque de planification, les objectifs mal ciblés, la difficulté à prioriser, la notification sur notre Smartphone que l’on ne résiste pas à lire maintenant tout de suite …
Un bon pas de fait : vous aurez trouvé le ou les fautifs !
La formation apportera probablement aussi des outils et techniques incontestablement très intéressants, qui, si vous les mettez en œuvre, vous aideront à mieux investir votre temps, comme par exemple en développant votre art de la planification, en clarifiant vos objectifs et vos priorités, en mieux délégant, …
Mais il est bien possible aussi que ces outils et techniques ne répondent pas à tous vos besoins profonds et/ou qu’ils soient difficiles à mettre en place dans votre quotidien.
Pourquoi ?
Pour deux raisons essentiellement :
→ La première :
La plupart de nos « voleurs de temps » internes sont liés à nos problématiques personnelles, avec en premier lieu l’inaptitude à dire non et les difficultés à déléguer, mais aussi le besoin de reconnaissance, faire plaisir, …
Ces besoins profonds nous font agir spontanément et répondre sans réfléchir aux sollicitations, y compris celles qui nous éloignent de nos priorités. Ces processus se font bien sûr à notre insu et nous n’en percevons que les effets : nous n’avons plus le temps de nous occuper de nos affaires !
Accepter l’idée que le temps n’est pas extensible, qu’on ne peut pas en «gagner» ou en «perdre».
La seule chose qui soit en notre pouvoir c’est «se maîtriser soi-même» par rapport à lui.
Le meilleur outil, la meilleure technique ne pourra jamais être efficace si l’on n’a pas d’abord développé une plus grande lucidité sur nous-même et notre manière de traiter les sollicitations, c’est à dire en définitive, identifié nos croyances personnelles qui nous poussent de manière répétitive à agir dans nos interactions avec le monde.
En référence à Eric Berne, fondateur de l’Analyse Transactionnelle, 5 croyances, issues de messages répétés influencent notre comportement depuis notre enfance :
- Faire avant tout plaisir à autrui (Fais Plaisir)
- Prendre sur soi sans jamais se plaindre (Sois Fort)
- Se dépêcher pour satisfaire autrui (Dépêche-toi)
- Faire constamment des efforts pour prouver sa bonne volonté (Fais des Efforts)
- Exceller en tout point pour être aimé (Sois Parfait)
Identifier notre croyance ne réglera pas le problème en soi, mais facilitera la prise de conscience du caractère inapproprié de notre réponse spontanée.
La répétition dans le quotidien de ces prises de conscience facilitera la prise de distance. Elles permettront également de laisser émerger des « antidotes » ou auto suggestions qui, au fil du temps, deviendront notre nouvelle habitude de fonctionnement.
→ La deuxième raison :
Certains « voleurs de temps » externes, sont liés au (dys)fonctionnement de l’organisation : réunions trop fréquentes, trop longues ou mal préparées, manque d’information, sollicitations à toute heure, …
Ces dysfonctionnements organisationnels, dont les effets sont certainement perçus par un grand nombre de vos collègues, auront du mal à être corrigés par la mise en place isolée de nouveaux outils ou nouvelles pratiques. Ils font partis du système et il sera difficile d’aller contre pour nombre de personnes qui en subissent les conséquences.
Par exemple, puis-je isolément décider de ne pas aller aux réunions que je juge trop longues et mal préparées. A priori, oui … Mais le ferai-je réellement au regard des conséquences que cela pourrait avoir, tant opérationnelles que relationnelles au sein de l’équipe ou aux yeux de ma hiérarchie ?
Une prise de conscience collective des dysfonctionnements et un travail collectif auront le mérite de partager les points de vue, d’émettre des idées et de décider ensemble d’ajustements significatifs et durables.
Autre exemple vécu : le traitement des e-mails :
Dans cette entreprise, il est d’usage totalement implicite de mettre beaucoup de personnes en copie des e-mails envoyés. Ce qui alourdit considérablement la masse d’e-mails et le temps de lecture, avec une utilité tout à fait relative … Certains ont mis en place individuellement une technique de déplacement de ces e-mails dans une boite spécifique, à lire en différé, évitant ainsi de polluer leur boîte de réception. Très bien …. Mais cela n’a pas réduit le nombre d’e-mail pour autant !
Il était également d’usage que les dirigeants adressent des e-mails à l’heure qui leur convient, y compris en dehors des heures de travail de leurs collaborateurs. Ils sont cadres au forfait jour et cela fait aussi parti de leur liberté et de leur autonomie.
Mais ce dont ils n’avaient pas conscience, c’est que ces e-mails étaient souvent considérés comme une injonction de répondre immédiatement pour le réceptionnaire.
Un travail collectif a permis de faire un état des lieux des faits (nombre d’e-mails) et des ressentis et perceptions de chacun. Puis de décider, collectivement et de manière partagée, de nouvelles manières de faire, et même de percevoir les e-mails entrants.
En conclusion, la gestion de notre temps n’est pas qu’une question de techniques et d’outils. Mieux gérer son temps passe aussi par une forme de développement personnel ainsi qu’une prise en compte de la situation collective. Donc, en cette matière comme en tant d’autres, et si l’on veut des résultats, il paraît opportun avant toute chose de commencer par un diagnostic de la situation, individuelle et collective.